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James Bond : 1977 – 1979 : « les années folles »

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James Bond : 1977 – 1979 : « les années folles » Empty James Bond : 1977 – 1979 : « les années folles »

Message  Callahan Dim 25 Avr - 0:59

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Par Guy Gadebois
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NB les photos ont disparues....

1977 : pour la première fois depuis la mise en chantier de « docteur No » Albert Broccoli a peur. « L’homme au pistolet d’or » a en effet confirmé la dégringolade artistique mais également financière de la franchise ; viennent s’ajouter à ça des bruits pas vraiment rassurant concernant « Warhead », une adaptation « pirate » d’ « Opération Tonnerre » produite par Kevin McClory avec Sean Connery dans le rôle de 007, et, pour couronner le tout, la fin de sa longue et fructueuse collaboration avec Harry Saltzman, lorsque ce dernier, acculé par des dettes de plus en plus importantes, fut forcé de revendre ses parts de EON et Danjaq à United Artists.


Sur « l’espion qui m’aimait », Broccoli se retrouve donc seul aux commandes d’une série ne pouvant plus se permettre l’échec. Le prochain Bond devra être un succès, sous peine d’être le dernier ; c’est pourquoi la priorité des priorités sera de couper définitivement les ponts avec la routine et les approximations qui caractérisaient les 3 derniers films.

Ainsi débute ce qui sera certainement la production la plus compliquée et la plus douloureuse de la série.

Première bonne nouvelle cependant : Guy Hamilton (qui avait pourtant déjà commencé à travailler sur un script dès 1974) ne sera pas rappelé derrière la caméra. Le 10ème Bond verra le retour à la réalisation du solide Lewis Gilbert, qui avait en son temps réussi à insuffler du rythme, de l’humour et même un certain délire à son film (« on ne vit que deux fois », pour ceux du fond qui ne suivent pas) tout en maîtrisant les aléas d’une production pourtant énorme. L’homme idéal pour le retour aux sources que se veut être le prochain Bond.

Exit également Tom Mankiewicz et ses blagues foireuses. Le scénariste « officiel » du 10ème Bond sera Christopher Young. « Officiel » parce que le développement du scénario de « l’espion... » sera déjà lui-même toute une aventure.

Huis clos plutôt poussif, raconté à la 1ère personne par un personnage féminin, et dans lequel 007 n’a qu’un rôle secondaire, « Motel 007 ou l’espion qui m’aimait » ne présente en effet que très peu, voire pas du tout d’intérêt cinématographique (du moins pour un Bond). Fleming ne s’y était d’ailleurs pas trompé, en exigeant dans son contrat avec EON que seul le titre de cette nouvelle puisse être exploité à l’occasion d’une éventuelle adaptation.

« L’espion qui m’aimait » est donc le premier Bond dont l’intrigue soit totalement indépendante des romans de Fleming. Ce qui ne veut pas dire que les choses aient été plus simples pour autant : une foule de projets, soumis par certaines plumes pourtant prestigieuses, seront refusés, avant qu’un scénario soit finalement retenu. John « Blues Brother » Landis, Stirling « Shaft » Siliphant, Cary « Superman » Bates et Richard Maibaum ont ainsi planché sur une histoire voyant les installations du SPECTRE prises d’assaut et utilisées par un groupe terroriste planifiant la fin du monde (idée rejetée par la production car trop sulfureuse pour l’époque) ; Anthony « Orange Mécanique » Burgess proposera de son coté un scénar paraît-il complètement dément constituant une démolition en règle de l’univers Bond (refusé lui aussi, pas fou, le Broccoli...). Au total 12 scénaristes pour une quinzaine de projets...

C’est finalement une histoire très proche de celle de « On ne vit que deux fois » qui sera retenue, dans laquelle Bond devra faire équipe avec une confrère de l’autre camp afin d’empêcher la troisième guerre mondiale. Compromis juridique oblige, le méchant ne sera plus Ernst Stavro Blofeld à la tête du SPECTRE, mais un certain Carl Stromberg, milliardaire fondu désirant obliger l’humanité à regagner le fonds des océans.

Question logistique et infrastructure, plus question, en cette période de crise, de la jouer petits bras. Le temps est revenu pour Bond d’en mettre plein la vue. « L’espion qui m’aimait » marque donc le retour des sites touristiques de rêve (les Alpes autrichiennes, les pyramides, la Sardaigne...) et des décors chromés somptueux de Ken Adam. C’est pour représenter l’intérieur du supertanker avaleur de sous-marins de Stromberg que Broccoli fait d’ailleurs construire à Pinewood ce qui reste encore aujourd’hui le plus grand plateau du monde : le célèbre plateau 007. Les dimensions énormes du décor poseront d’ailleurs de gros problèmes d’éclairage à Ken Adam et au chef op’ Claude Renoir, à tel point qu’Adam ne demandera à nul autre que Stanley Kubrick de bien vouloir se déplacer pour apporter quelques conseils, contre la promesse que la chose restera secrète (raté Stanley ^^).

Première constatation, et ce dès le pré générique : les James Bond en jettent à nouveau. Le film retrouve non seulement un format scope tirant au mieux profit de décors vraiment friqués, mais il marque également le retour des poursuites haletantes, des cascades impossibles bien mises en valeur (au revoir, les zigouigoui à la flutte), des gadgets rigolos, des voitures de sport trafiquées et de l’humour sympa (voir pour s’en convaincre la poursuite à ski finissant sur le désormais légendaire saut en parachute Union Jack filmé par John Glen).

« L’espion qui m’aimait » tiendra heureusement toutes les promesses de son somptueux pré générique. Après une des meilleures chansons - titre de la série (Marvin Hamlish remplaçant pour la circonstance John Barry à la musique), le spectateur assiste en trépignant à une succession ininterrompue de scènes d’anthologies : la découverte d’Atlantis, la base sous-marine de Stromberg (boulot génial de Derek Meddings sur les maquettes), le monstrueux Jaws (qui nous change des nains lanceurs de Dom Pérignon), les poursuites sur terre et sous la mer en Lotus Esprit amphibie, le supertanker croqueur de sous-marins (encore une fois merci Derek Meddings), la bagarre finale généreuse en morts violentes... ce 10ème Bond réussit pour les années 70 ce que les premiers films de Connery on fait dans les années 60 : il réinstalle Bond au sommet de la hiérarchie du cinéma d’action, faisant à nouveau de chaque film une variation astucieuse et inventive sur un thème pourtant archi-connu.

Deuxième constatation : « l’espion... » se paie même le luxe de dépasser son illustre modèle en redonnant enfin un semblant d’humanité à 007. Fini l’espion maigrichon qui échange des jeux de mots foireux avec les serveurs de restaurants. Bond redevient un fonctionnaire des services secrets de sa majesté, avec un passé et des sentiments : il retrouve ainsi son grade de Commander (c’est même en uniforme qu’il ira vider son chargeur dans Stromberg), évoque ses études à Cambridge avec un ami informateur, et fait même montre d’un malaise certain à l’évocation de sa défunte femme (« seriez-vous sensible, M. Bond ? »). Dans la foulée, M redeviendra l’amiral Myles Messervy et Q le major Boothroyd, on se croirait presque revenu au bon vieux temps de « ASSDSM ».

Bonne surprise : Moore tient enfin son personnage ; excellent dans les scènes de comédie, il sait également ne pas en faire trop dans les scènes plus « graves » et délivre certainement sa meilleure performance sur la série. Le reste du casting est à l’avenant : Barbara Bach (Madame Richard Starkey à la ville) fait oublier les fades Jane Seymour et Britt Eckland, Curd Jurgens incarne un délicieux mégalomane aux mains palmées et l’explosion de l’hélicoptère de Carolyn Munroe occasionne toujours un petit pincement au coeur (quel gâchis).

Les efforts consentis devant et derrière la caméra s’avèrent en tout cas payant. « L’espion qui m’aimait » est un triomphe à tous les niveaux ; le film marche du feu de Dieu, la chanson titre de Carlie Simon est en tête des hit parades et il faut désormais attendre 3 ans pour avoir sa propre Lotus Esprit.

Cependant, si le 10ème Bond est un triomphe, le film de l’année 1977 (sorti quelques semaines plus tôt) qui marquera définitivement l’histoire du cinéma reste le Star Wars de George Lucas ; et le succès rencontré par « Rencontres du troisième type » l’année suivante confirmera que l’espace est bien le thème à la mode en cette fin de décennie.

C’est pourquoi, soucieux de conforter la bonne place de Bond au box office, Broccoli décidera de reporter la mise en chantier de « Rien que pour vos yeux » initialement prévue (voir le générique de fin de « l’espion ») et d’embrayer directement sur « Moonraker », afin de démontrer, comme l’affiche du film le clamera d’ailleurs, que « l’espace appartient (aussi) à Bond ».



Sorti en 1979, « Moonraker » reprendra la formule et une bonne partie de l’équipe qui auront fait le succès de « l’espion qui m’aimait » ; Lewis Gilbert assure à nouveau la mise en scène, Christopher Young le scénario et Ken Adam les décors. Niveau musique, le film marque le retour d’un John Barry très en forme.

Niveau histoire, on oublie le roman de Fleming et son groupe de scientifiques nazis souhaitant faire tomber un missile sur Londres (seul le nom de Hugo Drax sera conservé) pour se contenter d’un copier/coller du scénario de « L’espion... » : même milliardaire, ici obsédé par l’espace, planifiant la fin du monde, même alliance avec un collègue d’une agence concurrente (la CIA en lieu et place du KGB)... et même tueur en la personne de Jaws, qui revient pour faire plaisir aux fans en bas age du film précédent.

Comme ce n’est pas tous les jours qu’on envoie 007 dans l’espace, pas question de faire un film à l’économie ; avec son budget énorme pour l’époque de 35 millions de dollars, « Moonraker » reste le plus cher des Bond, et ça se voit : tournage aux quatre coins du monde (Venise, Rio, Paris...), décors de malade (c’est prouvé : Ken Adam est fou), effets spéciaux derniers cri... Le film est si cher qu’il contraint Broccoli à s’associer pour la circonstance à un studio parisien, ce qui explique la présence de quelques gueules bien françaises au casting (Jean-Pierre « Caïus Bonus » Castaldi, le regretté Guy Delorme et même George Beller...ça en jette quand même moins que Kubrick).

Malgré toutes ces bonnes intentions, « Moonraker » reste pourtant encore aujourd’hui le Bond le plus détesté par la majorité des bondophiles ; moins que dans le pitch de départ (après tout James Bond ne va pas sauver une princesse dans une galaxie lointaine, mais se contente de détruire une base orbitale en navette spatiale), les causes de ce rejet sont plutôt à chercher dans la volonté de Broccoli de drainer le public le plus large possible entre 7 et 77 ans. « Moonraker » est un film qui souffre d’être écartelé entre une approche disons classique (du suspense, du sexe BCBG, des cascades, des morts) et le film pour enfants. Le problème gâche déjà le pré générique, où s’enchaînent le meilleur (la cascade encore plus forte que celle de « l’espion... » dans laquelle Bond en chute libre rattrape un gars pour lui voler son parachute) et le pire (le gag débile avec Jaws).

« Moonraker » sera donc un film bancal, dans lequel on pourra à la fois voir une fille se faire dévorer par des chiens et un géant aux dents métalliques partir bras dessus / bras dessous avec une naine blonde à couettes, Bond manquer de mourir broyé dans une centrifugeuse puis échapper à des poursuivants en plein milieu de la place San Marco à Venise au volant d’une gondole/hovercraft ou le pauvre Jaws jouer les utilités comiques dans chacune de ses apparitions, avant de gagner in extremis un statut rédempteur de freak amoureux...

Lewis Gilbert réussi cependant à insuffler un certain sérieux au film au détour de quelques plans assez glaçants (les beautés sélectionnées par Drax qui se regroupent en silence pour voir Bond dévoré par un python, ou ces couples « parfaits » s’embrassant dans la navette sur fond de fin du monde programmée) qui montrent ce qu’aurait pu être un « Moonraker » plus rigoureux. Il finira cependant par jeter l’éponge en transformant la grande bataille finale (sorte de mixe entre Opération Tonnerre et Star Wars) en une immense partie de Laser-quest où des types en blanc tirent sur des types en jaune au moyen de rayons laser bleus dans une ambiance de bordel généralisé et libérateur.

Conscient de l’absence totale de cohérence du film, Moore renoue avec la distanciation des premiers jours, et incarne à nouveau un James Bond « pour rire ». De son coté, le taciturne Michael Lonsdale interprète un Hugo Drax aussi aristocratique que maboul. « Moonraker » marquera la dernière apparition de Bernard Lee dans le rôle de M ; l’acteur mourra en 1981 d’un cancer, laissant une longue filmographie qui l’aura notamment vu jouer pour Carol Reed (« le 3ème homme ») et Michael Powell (« la bataille du Rio de la Plata »).

Même s’il franchit trop souvent la ligne en matière de concessions commerciales et d’humour douteux, « Moonraker » n’en reste pas moins un film hautement distrayant et plutôt bien troussé, ce qui le rend infiniment plus regardable aujourd’hui que les deux premiers Moore, par exemple (voire même certains Bond plus récents). Pas vraiment un Bond, en fait, mais plutôt un témoin décomplexé de son époque, quand les gens allaient une dernière fois s’éclater au Studio 54, convaincus par deux chocs pétroliers successifs que les 30 glorieuses et leur insouciance dorée touchaient à leur fin.

En terme de box-office, en tout cas, les années 70 finissent mieux pour EON productions qu’elles n’ont commencé. « Moonraker » est le Bond le plus cher jamais produit, il sera aussi un des plus rentables. Broccoli peut donc aborder les années 80 plus sereinement qu’il n’a abordé la décennie précédente : la franchise est remise sur les rails, avec un interprète populaire et partant pour encore quelques films. En producteur responsable, il sait toutefois que Bond est un personnage en or qui mérite mieux que de finir comme simple faire valoir entre deux gags et une cascade. Les années 80 marqueront le retour à une formule plus classique de la franchise, marquée par de vraies réussites... et d’authentiques foirades...


Fin de ce cinquième décryptage, mais James Bond reviendra...
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